Loading...
disques

Austin Lace, Le Yéti – Interview

Austin Lace, groupe belge pop s’il en est, revient avec un troisième album hanté par un étrange personnage : The Motherman. L’homme au masque de mort n’est pourtant pas la seule drôle de bête à avoir rejoint le groupe de Fabrice : on y retrouve en effet Thierry De Brouwer (autrefois chanteur de Melon Galia) aux guitares. Unis par un même amour de la pop, le duo travaille actuellement sur le premier album du nouveau groupe de l’ex Melon : Le Yéti.

Thierry (Austin Lace)

Fabrice Dutry

Thierry est guitariste d’Austin Lace, Fabrice est bassiste du Yéti. Il y a quelques mois, on voyait les groupes du label Matamore, sur cette même scène du Centre Wallonie-Bruxelles, et on était surpris de voir que, si chacun était le moteur d’un groupe, il participait aussi pleinement à ceux des autres. Est-ce que c’est devenu une façon spécifique aux groupes belges de faire de la musique ?
Thierry : Les musiciens de V.O., Raymondo ou Soy un Caballo sont de la même génération que nous. On a écumé des salles en même temps, on a fait partie de la même scène à un moment donné, donc il y a des échanges qui se font de manière naturelle. D’un autre côté, au-delà du simple fait artistique et de la rencontre, il y a la volonté de jouer un maximum. Parfois, il faut admettre qu’un projet n’est pas suffisant pour en vivre, ni pour vivre pleinement la musique. Et puis participer à d’autres projets, ça met en perspective ses propres morceaux. Il y a des situations où l’un est le boss de l’autre. C’est plutôt sain.

Fabrice : Des gens qui ont décidé, passé trente ans, de faire de la musique par conviction, il n’y en a pas des masses. Systématiquement, ces gens-là s’attirent. Quand je me retrouve sur scène avec Thierry, quand je le vois bouger avec sa guitare, je comprends l’énergie qu’il veut transmettre… on est exactement sur la même longueur d’onde sur ce que doit être un chouette concert, un chouette moment pop.

Le Yéti et Austin Lace sont deux groupes très différents. Comment conciliez-vous cette double casquette ?
Fabrice : Avec de la chance, parce que Thierry est très lent, et que moi je suis… très très lent. Thierry prend son temps pour faire l’album du Yéti parce qu’il veut qu’il soit exactement…

Thierry : … Je veux qu’il soit à la hauteur de mes attentes. Je n’ai pas, comme c’est le cas avec Austin Lace, une « échéance couperet ».

Fabrice : Nous, on en a eu une, mais ça m’a aidé, parce que sinon ça aurait pu prendre encore plus de temps.

La line-up du groupe change entre chaque album d’Austin Lace. C’est volontaire ?
Fabrice : On aime bosser avec des gens qui apportent du sang neuf, qui ont envie de donner de l’énergie. Je ne supporte pas de jouer avec des gens qui restent dans le groupe comme s’ils allaient à leur club de bridge ou faire leur badminton chaque semaine…

Thierry : Arrête, c’est mon sport, le badminton !

Fabrice : Sauf que quand tu fais quelque chose très régulièrement… Je ne veux pas que la musique soit faite comme ça. Avec les gens qui sont avec nous sur scène, j’ai envie de créer un moment artistique. Quand je n’ai plus ça, je préfère changer de personnes. Attention, ce n’est pas moi qui vire les gens : les gens vont et viennent naturellement. Jusqu’ici il y a toujours eu comme une bonne étoile qui veille sur le groupe.

On reproche parfois à Austin Lace le ton sucré et léger des chansons. Les Belges et les Français sont assez intransigeants envers la pop mélodique et lumineuse. Pourquoi adore-t-on ça quand ça vient des anglo-saxons, mais pas d’ici ?
Fabrice : c’est une question très importante. C’est sans doute ancré dans la culture française, et d’une certaine mesure dans la culture belge.

Thierry : Il y a une distanciation entre la mélodie et le texte. Dans les pays francophones, il y a une tradition de chanson française, de variété, de chansons à textes.

Fabrice : Je suis persuadé qu’il y a une espèce de pudeur qui fait que les gens n’aiment pas afficher leur bonheur de manière évidente, et quand les musiciens le font, les gens ne s’y retrouvent pas, ils sont un peu choqués. Une mélodie qui brille ou qui est vraiment positive… C’est comme si on n’en avait pas le droit.

J’ai l’impression qu’Austin Lace est, plus que n’importe quel autre groupe belge, à la recherche DU tube.
Fabrice : C’est sympa de dire ça, mais notre maison de disque ne croit pas qu’il y ait tant de tubes sur l’album. Mais c’est vrai que dans l’écriture on recherche l’efficacité, un peu comme Phoenix. Mais il n’y a pas de calcul au niveau de la structure, il faut avant tout que ça nous plaise à nous. « Young Folks » de Peter, Bjorn & John, c’est le tube ultime. On est dans le format du couplet-refrain, c’est accrocheur, séducteur, et ça permet d’élever certains moments de la vie un peu plus haut. C’est ce qu’on veut donner.

Qu’est-ce que The Motherman, la créature qui vous accompagne sur scène ?
Fabrice : C’est assez particulier parce que…

Thierry : Parce que tu racontes chaque fois quelque chose de différent !

Fabrice : On a développé le visuel au fur et à mesure de l’album. On s’est rendu compte qu’il comportait des choses très joyeuses et en même temps beaucoup plus sombres. On a donc travaillé sur les masques mexicains et sur la fête des morts. Les mexicains maquillent des crânes humains avec des couleurs hyper pop. On a trouvé que ça collait bien avec la musique. De là est né un personnage qui symbolise bien toute l’absurdité de l’enregistrement de l’album : ça a pris des plombes, à un moment je ne savais plus pourquoi je faisais ça… C’est l’absurdité incarnée de tout ce qu’on a vécu.

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *