ROMA DI LUNA – Casting The Bones
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Pour son dernier numéro, le magazine musical »Volume » a eu la bonne idée de concocter un dossier sur le revival folk des années 2000 et de répresentants ses représentants en 8 familles. Il en a pourtant oublié une, qui, de la nébuleuse Anticon aux titres les plus dépouillés de Ceschi Ramos, en passant par les disques chiadés d’Astronautalis, mérite autant de considération que les autres. Cette famille, qu’on a pu nommer folk hop (why not?), c’est celle des anciens rappeurs qui ont laissé tomber les ego-trips et les platines pour le plaisir simple d’une guitare sèche.
Sur cette voie, Roma di Luna est allé plus loin encore. Co-fondé par Alexei Casselle, autrefois connu sous le nom de Crescent Moon, membre d’Oddjobs, l’un des groupes importants de la vague rap indé apparue autour de 2000, ce duo a perdu tout lien avec le rap : pas de storytelling malin et facétieux, pas de réminiscence dans le phrasé des exercices stylistiques propres aux MCs. Le couple formé par Casselle et par sa femme Channy Moon est vraiment retourné à la source, celle d’une musique dépouillée, aussi froide, sombre et désespérée que les vastes plaines du Mid-West dont les époux sont originaires.
Poursuivant l’évolution déjà constatée sur »Find Your Way home », le couple Moon Casselle s’est encore assagi, il sonne moins brut. L’intensité dramatique de »Face of My Friends » est loin. Plus habillé et mieux produit que les autres, renforcé par une équipe de musiciens et par d’autres instruments que les simples guitare et violon qui suffisaient au couple jusqu’à ce jour, »Casting the Bones » apparaîtrait même plus quelconque, quasiment middle-of-the-road. Il assimile avec tant de respect les codes et les clichés des musiques blanches américaines, folk et country, leurs chants de désespoir et d’amours déçus, leurs banjos et leurs slide guitars, qu’il finit par sembler extrêmement familier, mille fois entendu.
Et pourtant… La voix de femme-enfant de Channy Moon est plus pénétrante que jamais (« Wildfire », « Silver Dagger », « Pearls for Pigs »), les lancées solo de son époux plus captivantes que sur les autres sorties (« I Can’t Afford to be Broke », « I’m Gone »), le contraste entre passages habités et moment de quiétude optimisé. Plus homogène que ne l’étaient ses prédécesseurs, aussi prenant, mais plus abouti encore, »Casting the Bones » parachève la mue d’Alexei Casselle, l’une des reconversions les plus frappantes et convaincantes qu’un rappeur ait connu.
Sylvain Bertot
A lire également, sur Roma di Luna :
la chronique de « Find Your Way Home » (2007)
la chronique de « Face of my Friends » (2007)
The Romance of Wolves
Tamar
Trouble Down the Road
Red Walls5 Wildfire
Fortune Teller
I Can’t Afford to be Broke
Silver Dagger
These Tears Ain’t Mine (reprise)
I’m Gone
Pearls for Pigs