ERIC MATTHEWS – The Imagination Stage
(Empyrean – Transit of Venus / Differ-Ant) [site] – acheter ce disque
Après un passage à vide de quelque huit années, Eric Matthews semble vouloir mettre les bouchées doubles : "The Imagination Stage", paru très discrètement au printemps dernier, est ainsi son quatrième disque en trois ans, faisant suite au (trop) court "Six Kinds of Passion Looking for an Exit", au (trop) long "Foundation Sounds" et à un EP de cinq titres. C’est aussi sans doute son disque le plus réussi depuis "The Lateness of the Hour" (1997) ; dommage que cela n’intéresse que les happy few.
Si l’on se perd en conjectures sur le choix du portrait peint hideux qui orne la pochette, son contenu, lui, séduit dès les premières notes de piano réverbérées et les premiers ronflements de basse de "Well Known Liar". Aussi imperméable aux modes qu’un ciré au crachin breton, l’ambitieux songwriter court toujours après ses rêves et ses chimères ("You’re alone in the city, chasing dreams", chante-t-il sur le très beau "Little 18"), cherchant à élever la pop jusqu’à des hauteurs qu’elle n’atteint que rarement. Sur "The Imagination Stage", on sent qu’il essaie une fois encore de résumer en un seul disque "Pet Sounds" des Beach Boys, "Forever Changes" de Love, le premier Left Banke, "Paris 1919" de John Cale, "Swoon" de Prefab Sprout et "Skylarking" de XTC, sans oublier le répertoire classique qu’il a longuement étudié.
D’où un album aussi foisonnant que les précédents, plein d’accords complexes et de changements de clé, de cordes et de cuivres, de pistes de voix empiétant les unes sur les autres, Saint Matthews poussant même le baroque jusqu’à s’accompagner d’un orgue d’église sur "Her Life". Mais on repère aussi quelques guitares folk ("Radio Boy") et même de discrètes boucles rythmiques ("That Kiss of Life") qui apportent à l’ensemble une simplicité qui manquait souvent aux précédents. Cerise sur le gâteau, l’ex-moitié des éphémères Cardinal n’a peut-être jamais chanté avec autant de souffle et de cœur. C’est finalement en renonçant à une certaine préciosité – mais pas à son habituelle méticulosité – qu’Eric Matthews a donné naissance à l’un de ses disques les plus précieux.
Vincent Arquillière
A lire également, sur Eric Matthews :
la chronique de « Foundation Sounds » (2006)
Well Known Liar
That Kiss of Life
Little 18
Radio Boy
Don’t Take Light
In Our Lives
Devil Red Glow
Her Life
Genius
The Imagination Stage
We Were Human
Fools
Does He Keep You Warm