ARMAN MÉLIÈS – Casino
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"Les Tortures volontaires", l’album précédent d’Arman Méliès, était un disque marquant, avec ses paroles précieuses déposées au compte-gouttes sur des mélodies épiques, enflammées, embrumées… Alors, à la première écoute de "Casino", on est un peu surpris d’y trouver dix chansons plutôt formatées, de 3-4 minutes pour la plupart. Surpris également de voir à quel point la voix du chanteur a pris de l’assurance. Surpris, mais assez intrigué pour remettre le disque dans la platine et le réécouter jusqu’à ce qu’il livre ses secrets. Car malgré des apparences plus banales, "Casino" se démarque de façon radicale des disques de la production française, en évacuant presque totalement les références traditionnelles du genre.
Musicalement en effet, les morceaux, bien que plus courts, parviennent à garder un lyrisme et une mélancolie caractéristiques des titres d’Arman Méliès, qualités dont les sources sont visiblement plus à aller chercher chez Talk Talk, Jeff Buckley ou Nick Drake que chez Jacques Brel. Les mélodies sont au rendez-vous sur l’ensemble de l’album (avec des mentions spéciales à "Belem", "Au dehors" et "Papier carbone") et Arman Méliès enrichit encore ses arrangements habituels (guitares aux vibratos profonds ou en arpèges cristallins, synthés millésimés) en y ajoutant de très belles parties cordes et cuivres et en mettant plus en avant une batterie inventive et pertinente. Il se permet aussi de durcir un peu le ton sur des titres comme "En nous la vie" ou sur les quelques courts intermèdes musicaux. Côté textes, Arman Méliès, un peu plus prolixe, continue de bâtir des univers hors du temps, légèrement surannés mais toujours d’une grande élégance ("Ton rimmel / te dessine / sur les joues des signes / que je ne comprends pas") ; des textes emprunts de pessimisme et dont les fulgurances font mouche ("dans les eaux laiteuses / du Tage / je nous vois"). Et au fil des écoutes, on glane ces petits riens qui font de "Casino", ce disque de "rock sophistiqué" (pour reprendre l’expression de Christophe sur "Les Paradis perdus"), un album vraiment attachant.
Christophe Dufeu
A lire également, sur Arman Méliès :
la chronique de « Les Tortures Volontaires » (2006)
la chronique de « Néons blancs et asphaltine » (2004)
Casino
En nous la vie
Amoureux solitaires
Mille fois par jour
Le soupir du monde
Belem
Sur ta peau
Au dehors
Papier carbone
Diva