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Disques

Osso Exotico + Z’ev – s/t

OSSO EXOTICO + Z’EV – S/t
(Crouton / Metamkine)

OSSO EXOTICO + Z'EV - S/tJe ne suis pas sûr qu’un disque aussi éloigné des canons de la pop, même dans ses ramifications les plus tordues, ait été chroniqué dans les colonnes de POPnews ! A bientôt dix ans, votre webzine préféré peut bien se permettre cette folie !
Pour ce disque difficile, le collectif portugais Osso Exotico, formation à géométrie variable, actif sur la scène des musiques improvisées depuis 1989, est accompagné par Z’ev, le légendaire percussionniste, personnage mystérieux, inclassable et pourtant incontournable. De son vrai nom Stefan Weisser, artiste conceptuel par excellence, entre sculpteur et musicien. Après avoir suivi au California Institute of the Arts les enseignements de Emmet Williams, poète concret et membre de Fluxus, il crée des performances visuelles et sonores dès 1972 à San Fransisco, puis prend part en 1978 au mouvement industriel, ce qui lui permet d’acquérir un public restreint mais fidèle, adepte de son esthétique tribale.
Cette entité hybride nous offre une œuvre brute, composée d’un seul morceau de quarante-cinq minutes constitué de trois mouvements.
Un premier mouvement, extrêmement bruitiste, fait de sons étirés qui semblent sortir d’un orgue Hammond (franchement c’est pas évident) et qui forment une sorte de drone très rugueux sur lequel Z’ev développe des entrelacs de percussions métalliques plutôt discrets. C’est bruyant, à la limite de la cacophonie mais néanmoins dans une certaine tradition bruitiste qui irait de précurseurs tels que Musica Elettronica Viva ou AMM jusqu’aux univers un peu plus rock (?) de Dead C (les AMM punks en quelque sorte, c’est d’ailleurs eux qui le disent sur leur excellent dernier album !).
Après l’orage, le deuxième mouvement met en avant le travail de Z’ev qui est alors discrètement accompagné par ce qui semble être un glass harmonica. Un passage calme, fait de subtils agencements où les percussions sont aussi bien frappées que frottées pour une version dépouillée, ritualiste et magnifique des expériences minimalistes de Tony Conrad ou de La Monte Young.
Enfin, le troisième mouvement où les percussions et l’orgue, moins dissonant, jouent à égalité, offre un final qui glisse de l’abstraction stricte vers une forme mutante, entre psychédélisme et musique industrielle.

Un disque qu’on pourrait qualifier de difficile, disons exigeant. En tous cas, impressionnant dans sa maîtrise de la structure sonore. Entre instinct et réflexion, l’ensemble manie toute une palette de bruits, des lisses aux striés (selon la classification chère à Pierre Boulez), pour une expérience sonore et organique des plus réussies.

Cyril Lacaud

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