JENS LEKMAN – Paris, Le Nouveau Casino, 27/02/2008
Si vous cherchiez un petit remontant pour sortir de l’hiver le moral au beau fixe, il fallait être au Nouveau Casino ce dernier mercredi du mois de février pour applaudir Jens Lekman. En première partie, on attendait avec impatience les Turques de Kim Ki O : pour une sombre histoire de permis de travail (si j’ai bien compris), il faudra se contenter de les voir se trémousser au bord de la scène (puis sur la scène, pour une chanson). Pas de Turques, donc, mais un Barth, venu présenter les chansons de son troisième album, "Cuchillo", à sortir sur le label Ici d’Ailleurs en avril. Gageons que la formule guitare/voix n’est pas celle qui sert le mieux ses compositions. On attendra l’album.
Avec l’attachant Jens Lekman, place à l’entertainment, un entertainment bien à lui, teinté d’humour et de second degré tout autant que de douce mélancolie et de kitsch assumé. Enchaînant les concerts, le Suédois exilé en Australie, vêtu d’un très seyant polo col mao orné d’une rose, ne perd pas de son enthousiasme et de son énergie et déroule ses titres, toutes périodes confondues, comme autant de classiques. D’un "Black Cab" peu véloce sur lequel Jens commence par s’emmêler les pinceaux au niveau des paroles, à un "Maple Leaves" bondissant en passant par "A Sweet Summers Night On Hammer Hill" pour ce qui est de la préhistoire, on est plutôt gâté et le public est aux anges.
Jens a beau déplorer pour la forme ne pas avoir pu s’entourer pour cette tournée de cuivres, trop dispendieux, le groupe qui l’accompagne ne démérite pas, au contraire, les cordes ou les samples suppléant à tour de rôle lesdits cuivres. Mais Jens sait aussi tirer le doux nectar de son dernier album, "Night Falls Over Kortedala", avec les tubesques "The Opposite of Hallelujah", "Friday Night at the Drive-In Bingo", "Sipping on the Sweet Nectar" ou "A Postcard to Nina", introduit par une géniale introduction en talk-over qui donne tout son sens à la chanson. Idem pour "Shirin" qui, outre la touchante introduction que lui donne Jens, rend vraiment mieux sur scène que dans sa version album un peu too much. La voix de Jens s’élève vers les plafonniers du Nouveau Casino et jamais une histoire de coiffeuse n’a été aussi irrésistible. Au chapitre émotion, Jens nous gratifie également de sa version d’"A Little Lost" d’Arthur Russell, s’accompagnant au kalimba, et on frôle la perfection. Le final sera plus mitigé : une version de "A Pocketful of Money" qui laissera les adorateurs de cette chanson sceptiques mais déchaîne les choeurs et les claquements de doigts du public, et un "Julie" de haute volée. On en sort ravis : Jens, reviens quand tu veux. Accessoirement, un des meilleurs songwriters actuels.
Guillaume Sautereau
A lire également, sur Jens Lekman :
la chronique de « Night falls over Kortedala » (2007)
l’interview (2006)
la chronique de « Oh You’re so Silent Jens » (2005)
la chronique de « When I Said I Wanted to be Your Dog » (2004)