Loading...
Disques

Plague Songs

V/A – Plague Songs
(4AD / Beggars ) – acheter ce disque

V/A - Plague SongsDerrière le joli emballage granuleux du digipack se cache un objet singulier, une compilation hétéroclite d’artistes ayant décidé de contribuer à la bande-son d’un projet télévisuel autour des plaies infligées par Yahvé à l’Égypte de Pharaon. La maison de production Artangel a commandé ces morceaux à 4AD pour Margate Exodus, et la maison de disques, qui a tout de même contribué au cachet gothique des années 80 (notamment avec les albums de This Mortal Coil et leur hiératisme crépusculaire) a accepté le projet et ouvert un carnet d’adresses (artistes labellisés ou non) qui aurait de quoi faire pâlir de jalousie n’importe qui. Rien que du beau monde, ou presque (que viennent au juste faire là les Imogen Heap ?), pour revisiter ou actualiser le texte biblique, et, ce faisant, détourner la commande. Loin de sombrer tous dans la dramatisation esquissée par le morceau hip hop d’ouverture (« Blood » par Klashnekoff), certains y vont sur un ton proche de la dérision : King Creosote, avec les Hallelujah de rigueur et un talent certain pour conter la pluie de grenouilles (« Relate the Tale »), Stephin Merritt, dans une version très europop de la vermine – poux, moustiques et autres charmants hôtes des peaux sensibles – accablant les Égyptiens (« Lice »), ou Brian Eno et Robert Wyatt adoptant – vocalement, musicalement et textuellement – le point de vue des mouches (« Flies »). Passé cette entrée en matière plaisante, on trouve quelques morceaux d’une grande beauté qui portent le projet bien au-delà : Laurie Anderson rappelle avec sa diction délicate, quelques claviers et cordes, l’extrême pouvoir de suggestion du minimalisme (« The Fifth Plague »), The Tiger Lillies inventent une musique de cabaret désolé (piano et scie musicale) pour évoquer le sort d’un junkie frappé à mort par la grêle (la voix de Martyn Jacques, sorte de contre-ténor éraillé par l’alcool, touche là au sublime), Scott Walker, en grand ordonnateur du mystère, dirige un chœur dissonant et tendu qui plonge la Terre dans l’obscurité complète (« Darkness »). Suivant les méandres de la grâce vocale toujours nonchalante de Rufus Wainwright, le florilège touche à sa fin, et les menaces mortelles enfin se dissipent, pas très loin de la terre promise.

David Larre

Klashnekoff – Blood
King Creosote – Relate the Tale
Stephen Merritt – The Meaning of Lice
Brian Eno et Robert Wyatt – Flies
Laurie Anderson – The Fifth Plague
Cody ChesnuTT – Boils
The Tiger Lillies – Hailstones
Imogen Heap – Glittering Cloud
Scott Walker – Darkness
Rufus Wainwright – Katonah

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *