PAUL COLLINS – Flying High
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Ces accords de Telecaster aigrelets, plaqués avec une rage contenue, les dents serrées… La power pop dans ce qu’elle a de plus profondément jouissive. Tous ces groupes, les Plimsouls, les Barracudas, les Replacements, Vic Godard & Subway Sect, et les Nerves, bien sûr. Auteurs de ce classique absolu, "Hanging On the Telephone", qui fut repris en 1978 (de bien belle façon) par Blondie sur leur album "Parallel Lines", les Nerves jetèrent l’éponge peu de temps après, et le batteur du groupe, Paul Collins, partit fonder The Beat (rebaptisé Paul Collins’ Beat), qui sortit deux albums au début des années 80. Installé en Espagne, Paul Collins sortit une ribambelle de disques dans lesquels il lui arrivait parfois de croiser le fer guitaristique avec une autre légende vivante, Cyril Jordan, une des éminences grises des Flamin Groovies. Collins fait partie de cette génération qui croyait en un retour aux sources salvateur, en une musique électrique et sans fioritures, héritée des premiers Who, où l’énergie échevelée le disputait à un sens aigu de la mélodie.
"Flying High" marque son retour à une power pop dont il a contribué à poser les bases, avec des constructions mélodiques au cordeau, renforcées par une énergie et une inspiration indéniables. C’est avec bonheur que l’on retrouve ce plaisir tout simple de pouvoir siffler le morceau sous la douche, ou d’être pris d’une crise de guitare imaginaire devant la glace (que celui qui ne l’a jamais fait me jette la première pierre) au son de ce "Rock’n’Roll Shoes", si évident et imparable qu’elle ferait passer un morceau de Paul Weller pour du Can. Cet héritage du Velvet, cette aridité sonore si essentielle à nos yeux, on peut les retrouver dans "Helen", qui sonne à s’y méprendre comme le "Rock’n’Roll" du groupe de Lou Reed. "Silly Love", avec ses guitares maniaques, ses soli sur une corde, rappelle que le rock reste une question de frustration et de mal de vivre.
"I’m on Fire", ballade acoustique parsemée de piano et d’un bottleneck déjanté, révèle une autre dimension dans l’œuvre de Paul Collins, plus intimiste mais tout aussi poignante. "Bobby" est de la même teneur, avec une mélodie façon "It’s Not Enough" de Johnny Thunders & the Heartbreakers. Collins n’est pas si loin du Springsteen de "Nebraska" ou du Dylan de "Desire" lorsqu’il se saisit d’une guitare Martin.
Les douze titres se dévoilent ainsi, entre électricité sèche et intimisme brisé (ahhh, cette voix déchirée sur "FDR"…). Je vous entends déjà vous interroger: "Mais en quoi diable ce disque se distingue-t-il de ces centaines de disques sortant tous les ans, et se situant exactement dans la même veine ?" L’Histoire, d’abord. Le talent, ensuite.
Frédéric Antona
Rock’n’Roll Shoes
Helen
Afton Place
Will You Be A Woman
All Over Town
I’m On Fire
More Than Yesterday
Bobby
Paco & Juan
FDR
Silly Love
Flying High