MUNCK//JOHNSON – Count Your Blessings
(Pony Rec / Rock Revolution / Socadisc) [site] – acheter ce disque
Nous sommes en 2037 : enfin au pouvoir, le Parti Pour l’Hégémonie Pop, après avoir interdit de concert les Rolling Stones, maintenant nonagénaires, et emprisonné à nouveau Mickael Jackson, cette fois pour gérontophilie, a enfin désigné le groupe Low comme président d’honneur de la République Indé Mondiale. Profitant de cette belle occasion d’assoir le département "slowcore" comme pivot du gouvernement, ceux-ci fouillent les Archives Officielles et tombent sur une antiquité : "Count Your Blessings" de Munck//Johnson, sorti en 2006. Après deux écoutes, leur décision est prise : ce groupe-là, au Ministère de la Culture et des Communications, contribuera à contre-balancer le courant power pop imposé par les vétérans d’Arctic Monkeys depuis trente ans. Tout à fait dans la ligne du nouveau Parti, le duo danois, alors discret, avait tout de même déjà été repéré ici par l’Organe de Presse Officiel – qui n’était à l’époque qu’un webzine officieux tenu par des résistants (depuis appelés à de hautes fonctions étatiques). Sur leur second album, Camilla Munck et Moogie Johnson faisaient preuve d’une belle allégeance : point de dérive bruitiste, voix céleste et tragique, tremblante mais toujours juste – sur "Slavesong", et son arpège au ralenti traversé d’une voix doublée, on était même proche du mimétisme avec le groupe de Duluth période "I Could Live In Hope". Il semble que cette fidélité paie aujourd’hui, et l’on comprend les autorités : la voix de Camilla évoque avec insistance Beth Gibbons, martyre pop qui – faut-il le rappeler – succomba héroïquement lors du second assaut de MTV en 2019.
Le Journal Officiel se félicite de cette nomination et tient à souligner les qualités de sobriété instrumentale du groupe, qui a su anticiper les mutations de la musique populaire mondiale, oscillant avec goût entre aérien ("The Streets") et plus tellurique ("This Time"), tout en rendant hommage à un folk plus classique ("Flesh and Bone") qui évoquera les Cowboy Junkies dans leurs meilleurs moments. La production, fine mais jamais étouffante, laisse la place aux respirations et place l’auditeur au plus près du groupe et de ses instruments, créant une intimité accentuée par l’enregistrement live de la plupart des morceaux. Tout comme chez Low, ou chez les Suédoises de Audrey, lenteur rime avec profondeur, et on ne saurait s’en plaindre. Longue vie à Munck//Johnson !
David Dufeu
Last Wish
Ellis of Davenport
The Streets
This Time
Slavesong
Flesh and Bone
Sweet and Lowdown
Oh, My Love
Be Kind