ISIS + AEREOGRAMME – In The Fishtank 14
(Konkurrent / Differ-Ant) – acheter ce disque
AAAAAAHHHHHH (long soupir mystico-extatique). Nous aimons Konkurrent, et Konkurrent nous aime. Les Hollandais ont beau être un peuple peu amène, il se trame de belles choses au pays du joint. Prenons un exemple : un sympathique label du cru (Konkurrent pour ceux du fond qui ne suivent déjà plus) a décidé, il y a maintenant quelques années, d’organiser de courtes sessions ("In the Fishtank", de 2 à 3 jours) dans leurs studios tout analo, histoire de capturer sur le vif et dans l’urgence les compositions, improvisations et reprises plus ou moins libres et souvent passionnantes, d’un, deux, voire trois groupes "amis" passant dans le coin. Pour mémoire, on se remémorera l’excellente prestation des cultissimes punk jazzeux (avec Television ça fait deux pratiquants du style), NoMeansNo et les clashs non moins fantastiques Low/Dirty Three et Black Heart Procession/Solbakken. Il va sans dire que l’idée d’assister à la collaboration de deux groupes aimés est des plus excitantes, alors celle de deux marottes personnelles… Car c’est en juillet 2005 qu’eut lieu la rencontre de deux figures majeures de la scène post-hardcore, les Américains d’Isis et les Ecossais d’Aereogramme. Les premiers développent à l’heure actuelle un métal à dominante instrumentale, à la fois lourd et atmosphérique, aux contructions progressives et au chant guttural (Aaron Turner) ayant abandonné au fil des années beaucoup de sa rage au profit d’une majesté quasi grégorienne. Les seconds posent sur des bases instrumentales souvent voisines – mais plus acides qu’atmosphériques – un chant clair qui les éloigne un peu des rivages metal/post-rock pour les entrainer vers les mélodies "happy sad" typées Death Cab For Cutie/Ben Gibbard.
En toute logique, les sessions de collaboration "In the Fishtank" aboutissent généralement à la domination de l’identité artistique de l’un des groupes, tandis que l’apport de l’autre protagoniste se situera essentiellement dans les finitions. La situation est quelque peu différente pour cette quatorzième session : si le chant de Craig B (Aereogramme) occupe la totalité de "Low Tide" et si la patte sonore des Ecossais est présente sur l’ensemble du morceau (toutefois plus heavy qu’à l’habitude, l’apport des Américains sans doute), la situation s’inverse complètement sur la deuxième piste, "Denial", où Isis renoue avec bonheur avec la rage d’antan, sans abandonner une miette de finesse. Enfin, c’est sur "Stolen" que fusionnent parfaitement les deux entités, qui accouchent pour le coup d’une longue plage éthérée successivement post-rock et ambient. Et c’est tout. 24 minutes de bonheur total. Et on est déjà en manque. D’où plusieurs choses : Aereogramme (un nom curieusement disgracieux) est un groupe très prometteur, mais déjà un grand groupe ; Isis est un groupe immense ; Aaron Turner est le plus grand chanteur métal du monde de l’univers et cela n’est même plus discutable.
PAM
Low Tide
Denial
Stolen