GRIZZLY BEAR – Horn Of Plenty
(Asphalt Duchess / Discograph) – acheter ce disque
Pas toujours facile de défendre un disque qu’on aime. Pas évident non plus d’aimer un disque qu’on veut défendre. Je dois avouer avoir un peu connu la deuxième situation avant d’avoir été confronté à la première. Nul reproche à faire pourtant à Grizzly Bear, dont la musique a ce qu’il faut pour séduire. Bien nommé, le groupe ne place pas le souci de complaisance dans les premières lignes de son cahier des charges. Mais est-ce un défaut ? Loin de là sans doute. Le premier aspect très brut, peu dégrossi, et forcément mal léché de ce double album n’aurait pourtant pas dû me déconcerter. La musique de Grizzly Bear, sur laquelle on peut, pour simplifier, coller l’étiquette de folk lo-fi, a ce qu’il faut pour contrebalancer cette production volontairement rudimentaire. A commencer par de très belles mélodies, dont la lenteur presque oppressante est précisément ce qui les rend difficiles en première instance et leur confèrent par la suite cette présence immuable, partiellement vaporeuse, en partie apaisée… Certains refrains, parce qu’ils flottent, apériodiques et sans en avoir l’air, au-dessus des guitares, se posent en opposition de principe à l’éphémère, et persistent, bien au delà de la possible fin du disque. C’est d’ailleurs probablement pour cette raison que le disque continue quand il est fini. L’armée de remixeurs qui s’est attaquée à Grizzly Bear a sans doute éprouvé cette même impression : ces chansons, dont le souvenir a du mal à ne pas perdurer, méritaient bien une seconde vie. Et dans la plupart des cas, ce second souffle n’est pas superflu, permettant, après avoir goûté aux petits ajouts et perturbations des titres revisités, de revenir avec plus de plaisir aux versions premières. L’imparable "Don’t Ask" sort grande gagnante de cette joute musicale, dont le refrain-sentence a été saisi avec les moyens qu’il faut par Alpha et Final Fantasy. Si la plupart des remixes ont été envisagés dans un esprit assez proche des compositions originales, à l’image de la reprise assez sage de "Disappearing Act" par Ariel Pink, et conservent cette espèce de fausse mélancolie stagnante qui les caractérise, certains titres subissent un traitement plus violent et deviennent de vraies plages électroniques. Le résultat n’en est pas inintéressant pour autant et on appréciera les différents efforts réussis pour sortir les morceaux des carcans dans lesquels on aurait pu les croire enfermés. C’était certainement mal les connaître.
Jean-Charles Dufeu
Deep Sea Diver
Don’t Ask
Alligator
Campfire
Shift
Disappearing Act
Fix It
Merge
A Good Place
Showcase
La Duchesse Anne
Eavesdropping
Service Bell
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