JACK THE RIPPER – Ladies First
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En prenant comme nom de groupe le pseudonyme du serial killer qui était (selon ses propres dires), "celui par lequel le 20ème siècle est né", le groupe se devait de distiller une musique faite de gouffres et de mises en abymes, d’ambiances sombres et de pavés luisants. Assez cliché, allez-vous me dire, certes, mais le nom de Jack the Ripper a un pouvoir de suggestion d’images qui tournent autour de cette thématique. Et leur troisième album a ce pouvoir là, bien qu’il arrive à s’en émanciper en incluant des éléments plus variés que ses débuts ne pouvaient le laisser supposer.
Il est bien évident, dès les premières mesures de l’album, que Jack the Ripper n’a pas, avec "Ladies First", composé une ode à la joie de vivre et aux balades printanières le long des bords de Seine. Il règne encore ici une ambiance de crépuscule, fascinante et fascinée par les héros des débuts du groupe : Nick Cave & The Bad Seeds. De certaines intonations du chanteur à l’atmosphère vespérale des titres, en passant par le premier de l’album, "From my Veins to the Sea", qui m’évoque "From Her to Eternity", un des meilleurs morceaux du dandy Cave. Les idoles ne meurent jamais vraiment, et il faudra encore du temps à Jack the Ripper pour se départir tout à fait de l’ombre de l’ancien chanteur de Birthday Party. Néanmoins, les influences du groupe évoluent et c’est avec grand plaisir que les cuivres viennent donner une dimension orchestrale et inattendue. Bien que ce type d’ajout évoque à grand nombre d’entre nous les monuments sonores d’Ennio Morricone ou Lee Hazlewood, l’arrangement de trompette sur "White Men in Black" n’est pas si éloigné du travail d’Yvan Julien sur l’album de Vince Taylor "Vince !" (Particulièrement le titre "The Man from El Paso"). "I was born a Cancer", apologie de la cigarette sur un rythme cabaret très Kurt Weill, se rapproche quant à lui du fameux "Monstre-toi" de Jad Wio. "Aleister", épopée floydienne période "Set The Controls for the Heart of the Sun", et référence au magicien Crowley, qui hanta les oeuvres des Stones, Jimmy Page et Kenneth Anger pendant un certain nombre d’années, nous indique clairement que Jack the Ripper continue à se situer dans la face sombre du rock, la plus fascinante mais également la plus dangereuse dans ce qu’elle peut susciter de chocs en retour. Dans ces danses avec le Crépuscule, on le sait, le diable gagne toujours : c’est une loi immuable depuis Robert Johnson…
Jack the Ripper a considérablement enrichi son champ d’action, et la présence du trio violon-trompette-piano apporte une originalité indéniable au groupe, lui permettant d’évoluer dans des styles plus variés et habités qu’auparavant. Toujours de tonalité gothique (entendu ici au sens large)- "Old Stars" n’aurait pas déparé sur un album de Dead Can Dance- Jack the Ripper part vers d’autres paysages musicaux. Pour ma part, je suis prêt à faire le voyage avec eux. Qu’en est-il pour vous ?
Frédéric Antona
Fromm y Vins to the Sea
I Used to Be a Charming Prince
Goin’ Down
White Men in Black
I Was Born a Cancer
Old Stars
Vargtimmen
The Apemen, the Bride and the Butterfly
Aleister
Hungerstrike in the Supermarket
Words
Hush