ELYSIAN FIELDS – Bum Raps & Love Taps
(Naïve) [site] – acheter ce disque
Marqué à vie par une danse du ventre de fin de concert à Saint-Lô (pourtant la ville en apparence la moins sexy de France) au milieu des années 90, j’ai toujours une pensée émue à l’évocation de Jennifer Charles, et de la langueur qu’elle déploie sur scène et sur disque au sein d’Elysian Fields. A cet égard, la pochette arrière de Bum Raps & Love Taps ne déçoit pas : on y voit Jenny (pour les intimes fantasmés que nous sommes) en position de tireur semi-couché et une mitrailleuse de fête foraine à la main, plus lascive que martiale.
L’album, quant à lui, répond à ces attentes des sens : accords de guitare amples, production léchée et aérienne, où la reverb occupe une place de choix. Sur ces bases auxquelles le groupe nous avait habitués, le duo égrène des compositions tantôt d’un intimisme dépouillé (à l’instar de l’émouvant "When") tantôt d’un psychédélisme nébuleux et plus dense (sur "Duel With Cudgels", la pièce de résistance de l’album – 4 minutes de montée en douceur avant l’arrivée de la voix et d’une guitare tordue). Après dix ans d’existence, l’apaisement n’est toujours pas le maître mot chez Elysian Fields, et si on peut reconnaître au groupe une maîtrise certaine de leur spécialité – disons, la pop atmosphérique -, l’album ne tourne jamais à l’exercice de style ou au recyclage de recettes passées. La voix de Jennifer Charles y est pour beaucoup, confondant avec délectation langueur et instabilité, jouant de sa séduction tout en y succombant en permanence. Dès le second titre, le mot d’ordre est de mettre le feu aux pelouses ("Set The Grass On Fire") sur un vrai-faux boogie aux allures d’OVNI défaillant : on ne peut qu’obéir à ce type d’injonction.
Doit-on espérer qu’Elysian Fields continuera à creuser le même sillon ? Saint-Lô demeurera-t-elle malgré tout un microcosme résolument pop où la coupe au bol est toujours en vigueur ? Si "Bum Raps & Love Taps" ne répond pas complètement à ces questions, ni ne révolutionne l’univers du duo, ces Champs Elysées donnent une vision assez fantasmagorique du paradis que le nom du groupe évoque : tour à tour dérangé et sensuel, instable et lumineux.
David Dufeu
Lions In The Storm
Set The Grass On Fire
Sharpening Skills
Duel With Cudgels
Lame Lady Of The Highways
When
Out To Sea
Bum Raps & Love Taps
We’re In Love