THOMAS DYBDAHL – Stray Dogs
(Glitterhouse / Chronowax) [site] – acheter ce disque
Quelques notes de piano, vite redoublées à la guitare avec le léger frottement du mediator sur la corde, et la voix de Thomas Dybdahl s’envole déjà, sensuelle et inquiète, pour retomber dans le nid duveteux d’un chœur gospel : "Rain Down on Me", premier morceau du nouvel album du Norvégien, donne le ton. Pas si éloigné que cela des somptueuses arabesques folk-rock du remarqué "That Great October Sound", le nouveau disque recentre pourtant quelque peu le propos : d’une part autour de l’ "irrésistible et insupportable" Cecilia à qui le disque est offert comme une guirlande de déclarations enflammées, d’autre part en limitant la palette de couleurs aux habituels tons chauds et veloutés (voix, vibraphone, guitare lapsteel, orgue Hammond) dont Dybdahl et ses musiciens sont familiers.
Conçu comme le concept-album des intermittences d’un cœur labouré, le disque propose une musique caressante et consensuelle, illuminée par l’inspiration vocale de son maître d’œuvre, enrichie par des digressions instrumentales qui suspendent le tempo ou suscitent la rêverie (l’intro de "Pale Green Eyes", l’étirement des phrases sur "Rise in Shame", l’étrange "Outro" qui ouvre la fin du disque sur un espace mystérieux). Les mélodies crève-cœur sont toujours présentes ("Cecilia", "Pale Green Eyes" encore, "Stay Home"), mais se développent pour mieux se fondre dans la chaleur de l’ensemble. Parfois, plus rare, un son dur et froid (le piano essentiellement) vient apporter un contrepoint au trop-plein de douceur. Comme si un remords naissait au milieu de tant de volupté, remords de l’alanguissement là où les concerts apportent, avec la maîtrise, le bruit et la fureur. Comme c’est un peu le cas pour The National, les disques de Thomas Dybdahl, homogènes et aboutis, laissent presque une légère déception à qui l’a vu et entendu en live aimanter tout un public. Mais ce n’est pas grave lorsqu’il s’agit simplement de passer de l’excellent (le disque) à l’exceptionnel (la scène), cela n’a pas d’importance lorsqu’une voix – comme la sienne, ici – tutoie si souvent les anges.
David
Rain down on Me
Cecilia
Make a Mess of Yourself
Pale Green Eyes
Either Way I’m Gone
Honey
Rise in Shame
Stray Dogs
The Willow
Stay Home
Outro