THAT SUMMER – Clear
(Talitres/Chronowax) – achetez ce disque
David Sanson est un homme passionnant : chroniqueur radio, défricheur à la revue Octopus puis à Mouvement, on connaissait ses goûts sûrs et affirmés que laissaient entrevoir sa plume et sa voix ambrée.
De son érudition musicale, on ne trouve sur son projet musical That Summer que quelques traces éparses comme autant de révérences distinguées à David Sylvian, Depeche Mode ou Bark Psychosis. Une imagerie plutôt mélancolique qui, de la New Wave de son adolescence à ses compositions d’homme adulte, avait de quoi m’interpeller. Ce parcours initiatique, nombre de gens de ma génération l’ont connu et le reconnaissent également chez les autres. Spleen idéal, ciel bas, toute cette mascarade qu’on sait futile et qui pourtant a construit nos goûts musicaux.
Ainsi, That Summer – notez ici le dénigrement anglophile d’une saison trop surfaite au goût du garçon – est une magnifique usine à nuages, d’où sortent toutes les nuances de gris, de bleus, de couchers oranges et de pluies d’orage.
Si la présence de deux membres de Bed, Benoît Burello et Jean-Michel Pirès, est palpable sur la couleur du disque (on pourrait évoquer un lointain cousin de "Spacebox"), That Summer se fait souvent plus mordant qu’il n’y paraît. L’ambiance générale est ouatée mais certainement pas délavée ou morne: cette musique est vivante et sous sa carapace sombre bat un coeur de lave. Passant allègrement d’un piano solo ("Electric Light") à des superpositions de cordes ("What If"), le musicien construit un album où l’éther et la terre jouent de concert.
Si l’électronique joue la plupart du temps un rôle de passeur entre les voix et les instruments rock, elle s’emballe sur un "the Top 1 (between laziness and heartache)" en se lançant dans une cavalcade hypnotique.
Au rayon des surprises, le choix des interprètes est magistral : Sylvain Chauveau joue la corde de l’émotion ("Handling with Care", vibrant hommage vocal à Martin Gore), Malcom Eden (ex-Mc Carthy, formation pré-Stereolab) se rappelle à notre bon souvenir ("Where You Are" et "True Light") et Sanson lui-même donne à ses compositions une dimension plus fragile, fuyant l’évidence et l’empathie. C’est finalement quand il chante lui-même ses propres compositions que son projet se révèle le plus intéressant. "Clear" s’achève sur un titre en français, comme si cette évidence linguistique avait été délibérément enfouie au fond du disque. Mais il n’y a que la vérité qui sait ainsi se cacher. Ironiquement, Sanson a intitulé cette fin… "Mon vrai visage".
Forte de cette culture du silence, d’arrangements pointillistes et d’une variété de sonorités souvent audacieuses, "Clear" s’écoute d’un trait, en apnée, condition essentielle pour en cerner toutes les saveurs. Un album qui se détache de l’air du temps et qui, contrairement au portrait du fameux Dorian Gray, n’en subira pas les outrages. Son auteur, lui, a encore quelques bas-fonds à sonder avant d’en sentir les effets sur sa création. Car les autres vieillissent. Pas lui.
Ursagraph
The More I Think The More I Dream
Brand New Scar
Electric Light
Handling With Care
Where you are
What If
The Top 1 (Laziness And Heartache)
The Top 2
True Light
Heroinogirl
Montreal
Mon Vrai Visage