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Festivals

Dans la série des inaperçus 2005 – Vendredi 18 février – Amadeus Tappioka, Spy, Madame de C***

DANS LA SÉRIE DES INAPERÇUS 2005 – Los Chicros, 1=0, Spleen, Maarten, Sweet Apple Pie, Discover, Tchiki Boum, British Hawaii, Kimlico, Amadeus Tappioka, Spy, Madame De C***

Vendredi 18 février

Ils sont trois, ils viennent de Nice et ils voudraient que le public se colle à la scène pour écouter leur rock étiqueté jeune (entendez : sonique et désinvolte). « Approchez, avancez ! On a fait 900 km pour venir ici, vous pouvez bien faire un mètre ! », lance avec esprit le chanteur sous sa tignasse décolorée. On peut toujours faire un pas vers eux, mais il en faudra plus à Amadeus Tappioka (ce nom !) pour sortir de leur pop ado exubérante mais brouillonne, joyeuse mais inaboutie. Des riffs tantôt funky tantôt glam-rock, une voix maniérée entre M et Saez, partant trop volontiers dans les aigus (comme on semble devoir le faire dans la musique d’aujourd’hui), un boa rose enroulé autour du pied de micro… Tout ça manque encore d’unité et de personnalité.

Spy n’a pas les prétentions des Niçois. Ce groupe d’Evreux délivre un rock simple et modeste, carré, trop carré, qui ne s’embarrasse pas de grandes paroles ni d’envolées lyriques grandioses. Les parties de guitare sont plus construites que chez Amadeus Tappioka, mais elles ne brillent pas par leur originalité, les textes dédiés à une certaine Maryline ou à Christina Ricci non plus. Le chanteur, pas bégueule, mouille son maillot du Portugal devant un parterre de fans locaux qui connaissent les paroles sur le bout des doigts. Rien de neuf sous le soleil, juste une bande d’amis qui s’amusent : à preuve, une reprise musclée de « Tainted Love » qui ne restera pas dans les annales, mais qui ravit la bande et leur public.

Incontestables vainqueurs de la soirée (au cas où il y aurait eu concours), Madame de C*** fait chavirer la soirée, jusque-là très sage, du côté obscur de la force du rock, avec toute la mythologie décadente qu’elle implique… Le chanteur, immense escogriffe au sourire espiègle, entre sur scène en titubant, et le guitariste, blouson noir et cheveux gras, semble seulement avoir oublié sa bouteille de Jack Daniels dans les loges pour avoir la parfaite « rock’n’roll attitude ». Le son est fort et bon. Brut, noir, tordu, abrasif. On pense à The Jesus & Mary Chain, Primal Scream (pour ses rythmiques électro cinglantes), Joy Division (excellente reprise de « No Love Lost »), Wire (pour les attaques sèches de guitare), enfin aux Rolling Stones d' »Exile on Main Street ». Planqué sous son bob, le bassiste tient la cadence tandis que le batteur hache les morceaux de coups saccadés et de roulements inspirés. Dans son brouillard éthylique, le guitariste bousille le matériel prêté par le groupe d’avant sous le regard furieux des organisateurs ou s’accroupit pour triturer sa guitare. Pas de quoi déstabiliser le géant suédois, qui se met torse nu, joue la carte, parfois facile, du slogan provoc’ (« no sex until marriage ! », clame-t-il, osé non ?), mais dégage une vraie présence. Les morceaux s’enchaînent, courts et nerveux, dans un beau raffut et une atmosphère tendue à souhait. Les oreilles bourdonnent encore lorsque le groupe quitte la scène. Mine de rien, nous venons d’assister à un vrai concert de rock, à la fois saillant et bordélique. Une partie du public est partie en cours de set, dégoûtée par l’image de déglingue, et la régie son est furieuse. N’empêche, notre cœur penche pour ces quatre lascars diablement talentueux.

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