BERNTHOLER – Merry Lines in the Sky
(Les Temps Modernes)
Au moment même où les années 80 reviennent en force à travers la mode, le design et surtout la musique, il m’arrive parfois de ne pas les reconnaître : certes, les couleurs fluo régnaient dans les cours de récré, le culte de la réussite sociale vomissait ses self-made men à la télé et le synthé domptait la guitare devenue simple instrument d’agrément. Mais la musique de cette période n’était pas aussi ridicule et dénuée de sens qu’on veut aujourd’hui nous le faire croire.
C’est ce que nous démontrent les excellentes rééditions du label Les Temps Modernes (LTM pour les intimes) dont le travail de spéléologie nous permet de découvrir des pépites égarées de groupes des labels Factory (UK et Benelux), les Disques du Crépuscule et toutes les formations qui gravitaient autour de cette confrérie : des Minny Pops à Ludus en passant par Section 25 ou les Blue Orchids.
C’est ainsi que l’édition du premier CD de Berntholer arrive à point nommé pour contrer l’invasion de formations pitoyables – sous-Spandau Ballet ou Fake – dont le Top 50 n’aurait même pas voulu comme paillasson. Premier CD et premier album, car jusqu’ici, la musique du quatuor belge n’avait été gravée qu’à trois reprises sur 45 tours. Si des démos en vue d’un album avaient bien été enregistrées en 1983-84, aucun disque de Berntholer n’était disponible depuis.
"Merry Lines in the Sky" regroupe donc l’anthologie de cette formation discrète réunie autour de musiciens talentueux et d’une frêle chanteuse aux origines albanaises. Sur ce disque, point de cliché stalinien, mais une évidence mélodique à mettre en parallèle avec celle des Young Marble Giants, Isabelle Antenna ou Polyphonic Size dont le spleen latent servait de bandes sonores idéales à des "chill-out" domestiques. Bien sûr, on retrouve le "son des années 80" mais l’auditeur averti en fera fi et remarquera surtout la qualité des compositions comme "My Suitor", basée sur un ostinato de violoncelle et hantée par une voix aussi perchée que troublante. Magnifique. Le romantisme flamand que cultivaient Drita et ses boys est une des choses les plus remarquables dans leur musique. C’est cette chaleureuse mélancolie – qu’on retrouve également dans l’atmosphère du Bruxelles d’aujourd’hui – qui les éloignaient des formations anglo-saxonnes blafardes et qui reste le point fort de cette ‘scène’ belge des 80’s.
Cette collection de chansons d’un autre âge brille d’audace et de fraîcheur et nous rappelle que bien des trésors demeurent encore enfouis dans les terriers de la mémoire collective. Laissons aux Temps Modernes le soin de les débusquer.
Ursagraph
My Suitor
Pardon Up Here
Lunacies
Emotions
You Grabbed Me by the Hand
Private Hotel
The Curtain Long
Kingdom Mine
Map Your Eyes
Shape the Rain
Merry Lines in Skies
A Distance
Simulation
Japanese Garden
The Others
My Suitor (video)
Exterior Nuit (video)
The Choice (video).