SEU JORGE – Cru
(Naïve)
Parfois, la pop lasse : ses guitares, ses couplets-refrains, ses relents de bière rance. On a envie d’autre chose : d’autres sons, d’autres rythmes, d’autres voix. Le disque de Seu Jorge tombe à pic. Exactement ce qu’il faut pour s’échapper de l’impasse pop et de ce sinistre mois de novembre : une bossa nova simple et accrocheuse, un crayon de couleur, un rayon de soleil venu du Brésil. Je vous voir venir : Seu Jorge, acteur remarqué dans "La Cité de Dieu", c’est la nouvelle coqueluche de la world music bon teint, l’attrape-bobos, etc. Peut-être… Mais quelle fraîcheur lorsqu’arrivent à nos oreilles les premières notes grattées à la guitare et la douce mélopée de "Tive Razão", le morceau d’ouverture ! Tout à coup, la grisaille se dissipe, le Pain de Sucre apparaît… "Mania de Peitão" donne envie de se déhancher les pieds dans le sable, le jean remonté jusqu’aux genoux. "Chatterton", reprise de Gainsbourg, agace d’abord, puis convainc grâce aux irruptions aiguës de la cuica, ce tambour à friction des sambas, qui imite le cri d’un animal lorsqu’on le frotte avec un chiffon mouillé. Bien sûr, Seu Jorge n’a pas inventé la musique brésilienne, ses ballades chuchotées, ses bossas susurées, ses pas de danse sur le sable. Ici et là, on pense à Chico Buarque, à Caetano Veloso, à Gilberto Gil, à Jorge Ben. Seu Jorge possède, lui aussi, cette voix grave et douce, intelligente en somme. La production, très sobre, n’en rajoute pas dans l’exotisme. Pas de chœurs langoureux, pas de paillettes comme au Carnaval. Pas besoin. La bossa coule de source, chaloupe doucement. Un vrai rockin’chair musical. En attendant que Seu Jorge devienne une star internationale (première partie de M à Bercy, il doit prochainement chanter des chansons de Bowie, grand fan, pour un film des studios Disney), les filles en string de Copacabana peuvent continuer à boire du Schweppes.
V
Tive Razão
Mania de Peitão
Chatterton
Fiore de la Citta
Bem Querer
Don’t
São Gonça
Bola de Meia
Una Mujer
Eu Sou Favela