ROCKET FROM THE TOMBS – Rocket Redux
(Glitterhouse / Chronowax)
Ce disque, enregistré l’année dernière, est une bizarrerie : le premier véritable album studio d’un groupe "pré-punk" de Cleveland officiellement séparé en… 1975. Ephémère et méconnu, Rocket From The Tombs a pourtant donné naissance à deux formations américaines mythiques : les Dead Boys (avec Stiv Bators) et, surtout, Pere Ubu. Début 2003, peut-être motivés par le revival d’un rock garage qu’eux-mêmes pratiquaient il y a plus de vingt-cinq ans, les survivants de RFTT remontent sur scène (ils devraient d’ailleurs tourner prochainement en Europe). Le batteur de Pere Ubu, Steve Mehlman, se joint à eux, tandis que le guitariste d’origine, Peter Laughner, mort à 25 ans de divers excès, est remplacé par Richard Lloyd de Television, qui doit avoir du temps libre vu l’activité pas franchement trépidante de son groupe. Lloyd disposant de son propre studio, les musiciens décident d’enregistrer les morceaux composant la set-list – qui figuraient déjà tous au répertoire de Rocket From The Tombs au milieu des années 70 -, sans forcément envisager une sortie commerciale. Contents du résultat (ça sonne forcément mieux que les captations live ou démos des mêmes titres, les seules existantes jusqu’ici), ils décident finalement d’en faire un album.
Certaines des douze chansons sont déjà bien connues, puisqu’elles se retrouvèrent sur les disques de Pere Ubu et des Dead Boys. La comparaison n’est d’ailleurs pas toujours en faveur de ces nouvelles versions. Si "30 Seconds Over Tokyo", par exemple, bénéficie d’un son plus musclé, on peut regretter le minimalisme glaçant de la version de Pere Ubu. Sans doute enregistré dans des conditions proches du live (son assez massif), le disque reste un agréable condensé de rock post-stoogien, puisant visiblement aux mêmes sources que le groupe d’Iggy Pop : ennui provincial, frustrations adolescentes et velléités arty – mais RFTT n’aura pas eu un John Cale et un Bowie sous la main pour transcender ces bonnes dispositions. Curieux quand même d’entendre ces morceaux aux titres évocateurs ("Never Gonna Kill Myself Again", "Amphetamine", "Life Stinks"…) joués par des quadras, voire quinquagénaires, qui, comme Wire, s’amusent à faire un boucan plus vraiment de leur âge. "Rocket Redux" plaira donc surtout aux nostalgiques, qui retrouveront avec plaisir la voix étranglée et vaguement menaçante de David Thomas (le chanteur de Pere Ubu) et les solis stylés de Richard Lloyd. Ce qui, avouons-le, ne nous rajeunit pas.
Vincent
Frustration
So Cold
What Love Is
Ain’t It Fun
Muckraker
30 Seconds over Tokyo
Sonic Reducer
Never Gonna Kill Myself Again
Amphetamine
Down in Flames
Final Solution
Life Stinks