NEIL YOUNG – Greendale
(Reprise / Warner)
Malgré ses défauts ou plutôt sa paresse latente, "Greendale" est un album éminemment attachant. D’une part parce qu’il marque le retour en bonne forme d’une idole, un rescapé, un insoumis et une légende, un de ces artistes auxquels je pourrais vouer une admiration à vie. Mais d’autre part il y a que cet album s’inscrit dans la tradition passionnante de ces troubadours folks qui ont passé leur vie à décrire leurs contemporains d’Américains avec un mélange de fascination et d’esprit critique, de tendresse et de réalisme social. Les équivalents musicaux des Clint Eastwood, des frères Coen et autres Gus Van Sant.
Dans ce concept album, Neil Young invente et raconte une ville paumée, Greendale et la vie qui va avec. Dans ce "Twin Peaks" du Montana, du Nebraska ou de je-ne-sais-où, il ne se passe rien qui défraie la chronique et pourtant on y naît, on y aime, on y tue et on y meurt. A Greendale vivent les Green. Il y a Earl le père, la jolie et militante Sun (sa fille), le cousin Jed qui tua un soir un flic aux abords de la ville et le grand-père que l’on vient interviewer sur ce triste fait divers… Comme quoi il n’y a qu’un meurtre de policier qui peut attirer les journalistes à Greendale. Pour peu qu’on s’y plonge, cet album peut devenir passionnant, comme un jeu de piste, une saga romanesque de l’Amérique profonde. "Greendale", l’album n’est d’ailleurs qu’une partie d’un projet plus vaste dont un DVD réalisé par Young lui-même sera l’aboutissement.
Il aurait juste fallu parfois que la forme soit aussi ambitieuse que le fond pour en faire un grand album. Car si le principe de l’album est passionnant, l’emballage l’est un peu moins. Neil Young semble parfois faire le minimum syndical : la horde sauvage qui fait cracher ses instruments et tourne sans finir autour des mêmes accords. On s’ennuierait presque si ce n’était pas Neil Young au chant et aux mots avec le Crazy Horse indompté à ses trousses. Heureusement que le Canadien sauve la mise grâce aux quelques envolées que propose l’album telles les ballades "Bandit" et "Leave the Driving" ou l’échevelé "Be the Rain", sur lequel Young finit par chanter à travers un mégaphone, comme à la tête d’une foule militante. On le retrouve fier, sauvage et revenu de tout. Les retrouvailles n’en sont que plus belles.
monsieur Morel
Falling From Above
Double E
Devil’s Sidewalk
Leave the Driving
Carmichael
Bandit
Grandpa’s Interview
Bringin’ Down Dinner
Sun Green
Be the Rain