ODDFELLOWS CASINO – Yellowbellied Wonderland
(Pickled Egg / Limonade)
Au pays merveilleux de la pop élégante, élégiaque et sophistiquée, il
arrive que l’on s’ennuie ferme. Pour un prétendu nouveau songwriter hyper
talentueux vanté par la publicité, combien de baillements… Heureusement on peut compter sur les dénicheurs de talents de talent de chez Pickled Egg pour secouer un peu le cocotier… Après les bricoleurs du dimanche de Fariña, les timbrés nippons de Pop Off Tuesday, voilà que débarque ce casino des mecs louches à l’étrange allure et, tout bonnement, un des meilleurs disques pop de 2002, après un single déjà remarqué dans ces pages et dont on retrouve ici les deux titres. L’homme qui se cache derrière ce Casino, David Bramwell s’y entend pour marier beauté et bizarrerie, excentricité et légèreté, finesse d’écriture et production pointilleuse et inventive, le tout avec une personnalité confondante. Malgré le classicisme des ingrédients de base (flûte, piano, trompette, orgue, mélodies, quelques clicks et autres bidouilles…), le résultat est diablement personnel et l’on en vient à croire que la terrible phrase de "The Last Great Days" : "These are the last great songs, they’ll be recycling early familiar ones from now on" n’est pas si présomptueuse qu’elle en a l’air. Alors que la famille Elephant 6 ou des groupes comme Simian ou Beta Band usent parfois d’un psychédélisme en gros sabots, Bramwell travaille dans la dentelle, ne s’autorisant occasionnellement que quelques dérapages de trompettes ou quelques violons orientaux. Le "concept" du disque, l’histoire de cette troupe de freaks conduite par le bienveillant Ambrose Oddfellow sur les routes d’Angleterre à la fin du dix-neuvième siècle, qui donne son nom au groupe et son inspiration aux textes, loin de paraître lourd et gratuit, concourt à l’ambiance désuète et tragique du disque à l’égal de la musique et de la voix fragile et distante de David Bramwell. A noter que pour une fois, je peux m’enflammer pour un disque d’obédience purement pop sans la moindre mauvaise conscience ou réserve à l’idée d’encenser une énième habile artisan rabâcheur planté à la croisée des chemins des Beach Boys, des Beatles ou de Left Banke voire Scott Walker. Pour le coup, Oddfellow Casino, sans pour autant sacrifier à aucune tendance ou aucun gimmick, est sans doute aussi moderne que n’importe quel avant-gardiste électro à la mode ou en passe de l’être.
Délicieusement à part, habilement à côté de la plaque, "Yellowbellied Wonderland" et ses onze symphonies de poche convoquent en tout cas de magnifiques fantômes. Brillant.
Guillaume
Road Movie
Giant Redwoods
Some Corner Of The Evening
The Last Great Days
In This House
Put The Bird To Sleep
Arthur, who Drowned in his Sleep
Hide me Joe
The prune faced Man and his Fat Wife
Swingers
Ballad of Oddfellow