DONKISHOT – Donkinaute RIP
(Autoproduit)
Conformément au programme établi sur son album précédent avec le titre « Cyberapeur », Donkishot semble s’être dit définitivement que l’auto-promotion n’était pas son fort, et qu’il valait mieux se contenter d’enregistrer morceau après morceau comme si de rien n’était pour les diffuser ensuite vaille que vaille via Internet. D’où ce Donkinaute RIP, troisième album en moins d’un an, dont le titre (proclamation d’un suicide artistique) et le support (un bête CD-R décoré à la main au marqueur) sont un écho au Donkinaute VIP, première compilation fourre-tout de ses principaux morceaux. Personne ne sera donc surpris d’apprendre que ce nouvel album est terriblement inégal, qu’il passe à une vitesse assez inédite du franchement rédhibitoire au vraiment très bon, de la bouillie expérimentalo-casse-bonbon aux moments de grâce.
Donkinaute RIP est une compilation affreusement hétérogène, mais l’auteur a tout de même pris soin de mettre de l’ordre dans ses morceaux. Trois moments de longueurs à peu près égales se partagent le disque, à commencer par le pire d’entre eux. Sur les premiers titres, Donkishot s’escrime en effet à donner coûte que coûte une suite au dispensable « Baise mon Cul », et à régler ses comptes avec quelques rappeurs, notamment celui dont le pseudonyme commence par un « t » et se termine par un « x ». Il y aurait largement de quoi commenter, débattre et tergiverser, mais passons.
La deuxième partie du disque privilégie les morceaux les plus abrupts, parmi lesquels se remarque une évolution notable : si Donkishot produit toujours ses propres beats, il est désormais accompagné par des DJ’s, les Fresh Makers, et principalement par Stepfather Swing. L’un des titres, « Tais-toi et Scratches », est même explicitement consacré à l’art du turntablism. Deux morceaux surnagent ici : la pornographie violente de « De la Bonne Poésie », et surtout « Oedipe », un titre sur les rapports père/fils dont le final (« …demande à Didier Schuller ce que ça fait d’avoir un gamin, si j’en ai un, je le jette avec l’eau du bain, c’est lui ou moi putain ») se retient plutôt bien, dans le genre.
Après toutes ces décharges, la troisième partie paraîtrait presque douce. C’est en tous cas la plus variée, la moins rebutante, en somme la plus proche de Sortez vos Mouchoirs, son disque le plus abouti à ce jour. Cela commence avec « …Que Dire », sans doute pas le plus sensationnel en terme de paroles (genre « avec mon cur de rappeur j’ai jamais osé dire je t’aime »), mais son phrasé étiré et ses sons nippons sont du plus bel effet. Cela continue avec le lent « 20-1 » et sa description âpre des quartiers. Et cela se termine comme sur l’album précédent, avec les meilleurs titres, personnels sans être trop outranciers et musicalement les plus marquants, « Il ne s’est pas Raté », et surtout « Trop Humain ».
Dans 10 ans, ou 20 ans, une certaine justice voudrait que sorte une sorte de best-of des multiples enregistrements de Donkishot. S’y retrouveront « Restauration Rapide », « Sang toi », « Lolo », ainsi que ses deux meilleurs titres, « Ceci n’est que l’Intro » et « Insomnia », et à coup sûr une poignée de morceaux issus de ce Donkinaute RIP. Cette compilation sera indispensable. Alors, pourquoi se priver du plaisir d’en découvrir les titres dès maintenant et de pouvoir dire le moment venu « j’y étais » ? Même s’il faut pour cela absorber les 10 litres strictement inutiles de bile pure que Donkishot déverse sur les toutes premières plages de ce nouvel album.
Sylvain
Bonsoir Carla
Sur vos Gueules
Merci Fils de Pute
Rappeur Malgré Moi
Tais-toi et Scratches
De la Bonne Poésie
Avec les Pieds
Oedipe
La Petite Voix
Freestyle Brusque
Que Dire…
20-1
Trop Humain
Il ne s’est pas Raté