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Disques

Dakota Suite – This River Only Brings Poison

DAKOTA SUITE – This River Only Brings Poison
(Talitres / Pop Lane)

DAKOTA SUITE - This River Only Brings PoisonRarement disque aura si bien porté son titre, si peu trompé son monde : à n’en pas douter, le groupe mené par Chris Hooson semble baigné ici par un fleuve dont le nom est Léthé, fleuve mythique qui distille l’oubli comme le seul poison capable d’adoucir les blessures d’une existence douloureuse. L’atmosphère languide qui se dégage de cette longue suite de morceaux anémiés, bribes disjointes d’un folk asthénique, est une atmosphère de lente dérive, de celle qui vous saisit lorsque vous vous perdez dans une rêverie morbide ou le désir triste de la fuite, une sorte de post-scriptum au "Dead Man" de Jarmush : "take your thoughts to the river, take your feelings to the sea, and watch them float away" ("conduis tes pensées à la rivière, tes sentiments à la mer, et regarde les flotter vers le lointain" sur "pillows in the water"). Oh, ce n’est pas que l’on trouve là quelque changement à la mélancolie qui a fait la signature du groupe, mais elle atteint ici une sorte de forme adéquate, éminemment expressive, bien que traduite en un affaissement généralisé (voix traînante, notes égrenées sur la durée, mellotron languissant, batterie avare), en un engourdissement dépressif qui tourne parfois à l’aigre. Comme Beth Gibbons, Chris Hooson semble souvent chanter pour dire qu’il n’en a plus la force ("I wish I was dead" sur "sand fools the shoreline"), pour narrer la désolation d’amours sans communion ni espoir, pour regarder lui échapper les grains de sable du temps et de l’existence. C’est parfois très beau, notamment lorsque c’est simplement porté par la musique, dans les quelques instrumentaux qui émaillent l’ensemble, c’est parfois plus convenu, quand les mots se font maladroits ou la musique répétitive. Mais on se laisse facilement aller soi-même, au fil de l’eau, à cette torpeur musicale, à ce songe sans images et sans passé. Et l’on ne s’y trompe guère : la musique qui drogue ainsi à l’oubli n’est pas elle-même une musique oublieuse, elle a traîné ses guêtres du côté des clochards célestes de l’Amérique, Tom Waits, Will Oldham et autres American Music Club (deux membres du groupe ont contribué aux premiers enregistrements de l’album à San Francisco) et elle parle assez bien le langage de ces "frères d’âme". Puisse le dialogue se poursuivre.

David

the lepers companion
boats in a sunken ocean
the finished river
let’s share wounds
verdriet
sand fools the shoreline
let’s be on our own
the ferris wheels of winter
we made it rain
how safe we must seem
pillows in the water
matching eyes and hands
the space around your sleeping

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