V/A – This is where I belong : The songs of Ray Davies and the Kinks
(Rykodisc / Naïve)
Devant un tel disque hommage à un des groupes les plus séminaux et essentiels de la pop britannique (voire de la pop tout court), deux options sont possibles : soit s’en servir comme d’un frisbee modèle réduit en clamant haut et fort que les originaux sont insurpassables, soit tenter de voir ce que ce gang hétéroclite de groupes américains (au sens continental du terme : il y a même Bebel Gilberto venu pousser une reprise bossa nova de « No return « ) peut extraire de chansons qui fleurent bon le fish and chips et le village vert – et, partant, essayer de répondre à ces questions à la Nick Hornby que tout mélomane s’est un jour posée (du genre « une bonne chanson résiste-elle à une mauvaise reprise ? Une bonne reprise donne-t-elle immanquablement envie de se replonger dans les originaux ? Where have all the good times gone? » etc etc). Choisir la seconde alternative pour un « critique » est d’autant plus facile que ce disque est idéal à chroniquer : Sachant qu’il s’agit de scies de la musique populaire, on trouvera d’un côté ceux qui auront réussi à donner une nouvelle fraîcheur à un titre qu’on connaît déjà par cœur, et de l’autre les malheureux qui auront échoué à manifester plus de personnalité que la chanson qu’ils ont choisie de reprendre. Dans cette dernière catégorie (heureusement peu représentée) , citons vite fait Josh Rouse qui s’attaque à un « A well-respected man » clairement trop subtil pour lui, Cracker dont la version de « Victoria » est à peine digne de l’école maternelle, et Ron Sexsmith désespérément ennuyeux sur « This is where I Belong « . Mais tout cela n’est que du bran à côté du plaisir qu’on éprouve en écoutant les Fountains of Wayne dynamiter « Better things » dans une version pimpante comme une nymphette qui se rend à son premier bal, les merveilleux Steve Forbert et Jonathan Richman sur respectivement « Starstruck » et « Stop your sobbing », la relecture délicieusement nashvilliene de « Muswell hillbilly » par Tim O’Brien, et même Lambchop qui, à la surprise générale, se tire honorablement de son interprétation d’ « Art love « . Dans ses notes de pochette, Ray Davies (qui, j’allais oublier, se rend sur « Waterloo sunset » un hommage réflexif d’autant plus dispensable qu’il est accompagné de Damon Albarn) joue au père Fouras de la pop sur le thème « Je ne connais pas les trois quarts de ces petits gars mais je suis curieux de voir ce qu’ils vont faire de mes chansons ». Ray, si tu lis ces lignes (ce dont je ne doute pas et te salue au passage), tu peux être rassuré.
JC
Fountains of Wayne : Better things
Steve Forbert : Starstruck
Jonathan Richman : Stop your sobbing
Bebel Gilberto : No return
Josh Rouse : A well-respected man
Cracker : Victoria
Queens of the stone age : Who’ll be the next in line
Matthew Sweet : Big sky
Lambchop : Art lover
Bill Lloyd & Tommy Womack : Picture book
Tim O’Brien : Muswell hillbilly
The Minus 5 : Get back in line
Fastball : ‘Till the end of the day
Ron Sexsmith : This is where I belong
Yo la Tengo : Fancy
Ray Davies & Damon Albarn : Waterloo sunset