TREMBLING BLUE STARS – Alive To Every Smile
(Shinkansen / Poplane)
Les Trembling Blue Stars font partie de ces groupes avec lesquels on a tissé des liens particuliers, empreints de fidélité, d’admiration et de bienveillance. Malheureusement, cette connivence un peu naïve nous a souvent poussés à faire preuve d’une indulgence quasi religieuse vis à vis d’un artiste (Bobby Wratten) doué certes, mais parfois conservateur dans ces inclinations musicales. C’est, d’ailleurs, cet argument qui nourrit la critique de ceux qui ne sont pas (ou plus) acquis à la cause résolument indie de la démarche des TBS. En effet, qu’attendre d’un artiste dont le discours musical semblait de plus en plus se résumer à la somme invariablement récurrente de guitares éthérées, de violons synthétiques et de textes nostalgiques ? Bien sûr, le charme des TBS réside en grande partie dans cette résistance silencieuse, humble et imperturbable aux hypes artificielles de l’indiepopmusic. Mais le conservatisme n’est-il pas l’apanage des artistes en fin de carrière ? A-t-on le droit de toujours appliquer la même recette quand on est censé incarner une certaine idée de la créativité alternative ?
TBS était devenu un dilemme.
C’était compter sans la formidable capacité à rebondir d’un songwriter définitivement important. Bobby Wratten a fait le ménage dans son écriture, et de cette "renaissance" a émergé "Alive to Every Smile".
Dés l’intro de la première chanson "Under lock and key", l’évidence du changement s’impose. Le son est brut, la mélodie presque violente. Bien sûr, il est encore questions d’amours déchus et de sentiments frustrés, mais cette fois-ci en des termes enfin objectifs : "you’ve got to stop fucking her up, you’ve got to grow up". B.Wratten impose d’entrée ses nouvelles règles du jeu ; il sera désormais observateur et non plus exclusivement acteur passif de ses romances mélancoliques.
Cette nouvelle donne est l’élément fondateur des TBS nouvelle génération. Car si B.Wratten a ouvert son inspiration à de nouvelles orientations thématiques, il a aussi élargi le champ de ses collaborations : un nouveau bassiste, un nouveau (vrai) batteur, une nouvelle chanteuse (malgré la présence toujours aussi obsédante et touchante de la voix d’Annemarie Davis)…Le son est devenu plus épais, plus dense, donnant ainsi une dimension plus générique au discours musical du groupe.
"Alive to Every Smile" est tout simplement le meilleur album des TBS à ce jour… Animé par une ambition musicale quasi inédite chez B. Wratten, il met en exergue une maîtrise de l’écriture pop à faire pâlir de jalousie tous les Murdoch et autres Badly Drawn Boy de la terre. Les paroles sont toujours aussi intimes et troublantes de vérité ("the world had come down to two people in two rooms.."), mais elles sont enfin libérées de toutes les frustrations égocentriques de l’auteur, de cette particularité presque indécente des textes des albums précédents.
Les Londoniens nous offrent, en prime, de véritables tubes pop potentiels ("Haunted Dreams" , le single parfait "the Ghost of an Unkissed Kiss et "St Paul’s Cathedral at night" où les Go-betweens rencontrent New Order) comme si leur émancipation était aussi passée par un retour à des formats plus simples et plus explicites. Bien sûr les magnifiques ballades de l’album ("Ammunition", "Little Gunshots") sont là pour nous rappeler que la musique des TBS est et sera toujours la bande son de nos dimanches d’automne pluvieux et de nos faillites sentimentales. Mais, on est désormais convaincu qu’elle peut aussi être l’écho de nos joies, de nos enthousiasmes et de nos succès.
Ce disque est important, souhaitons-lui simplement de déborder le cadre trop réducteur du succès d’estime…
Under Lock And Key
With Every Story
Haunted Days
Here All Day
Until The Dream Gets Broken
St.Paul’s Cathedral At Night
The Ghost Of An Unkissed Kiss
Maybe After All
Ammunition
Little Gunshots