JOHN FRUSCIANTE – To Record Only Water For Ten Days
(Warner)
Deux choses à savoir sur John Frusciante : 1) il a été (et est redevenu) le guitariste prodige des Red hot Chili Peppers (j’entends déjà les bonnes âmes indé se gausser, à tort) 2) il a été un défoncé notoire. Deux éléments de l’état civil qui n’expliquent pourtant pas pourquoi John Frusciante a commis un des plus déchirants et déchirés albums de la décennie passée. Musique en haillons et cerveau en lambeaux : Niandra Lades and usually just a T-shirt, le premier album solo de Frusciante est peut-être le seul de ces années à mériter l’appellation pourtant archi-rebattue de "choc" (à tous les sens du terme). Sur ce disque à la fois document psychiatrique intime et performance ultime (parfois inaudible), Frusciante flirtait dans le cadre (large) du songwriting avec toutes les limites personnelles et musicales : on pouvait trouver une filiation avec Captain Beefheart ou Syd Barrett et ce n’était pas rassurant. Disque éprouvant (parce que sans inhibitions), pratiquement insupportable sur le fond comme sur la forme, il n’en comptait pas moins de moments de beauté brute et terrible. Après la surprise d’un deuxième album solo (on aurait pu penser que Niandra était un voyage sans retour) un tout petit peu plus acceptable, ce troisième album voit Frusciante revenu au monde des vivants (avec des dents neuves et un sourire éclatant). Et dès le premier morceau, on se rend compte qu’il a décidé d’être commercial. Ceci étant dit, il n’y est pas véritablement arrivé, trop décalé, trop largué, trop personnel. Être commercial pour Frusciante, c’est sûrement faire des couplets/refrains, sinon on ne oit pas…ah si, peut-être ces boîtes à rythmes eighties dont même Visage n’aurait pas voulu. La seule nouveauté, ce sont ces rythmes que personne n’a osés même dans les tendances les plus revivalistes 80’s (les Ween doivent être bluffés). Sinon, on retrouve ces guitares lo-fi, acérées, irrémédiablement sales; et surtout cette voix expressionniste, que rien n’effraie. Étranges morceaux, quasi-tubes (Someone’s, Moments have you), qui, interprétés par d’autres, seraient de la pire daube FM ringarde. C’est là toute cette singularité : Frusciante n’a peur de rien : ni du mauvais goût, ni du goût, ni d’être intégralement lui-même. Pas de deuxième degré, juste l’irrémédiable étrangeté de celui qui n’est que lui-même et n’a pas besoin d’avancer masqué.
Laurent
Going inside
Someone’s
The first season
Wind up space
Away and anywhere
Remain
Fallout
Ramparts
With no one
Murderers
Invisible movement
Representing
In rime
Saturation
Moments have you