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Expérience – Interview

Difficile de parler de Michel Cloup sans évoquer Diabologum. Surtout après avoir écouté le premier album de son tout nouveau groupe, Experience. Mais si « Aujourd’hui maintenant  » rappelle, par certains côtés,  » #3 « , dernier et sûrement meilleur album des Toulousains, il recèle également son lot de surprises. Pour preuve, certaines chansons sont construites uniquement à partir de samples, et l’album se termine par une plage multimédia, étrangement envoûtante, où images, textes et musiques se mêlent habilement.

EXPERIENCEEst-ce qu’il a été difficile d’arrêter Diabologum ? Comment s’est passée la transition d’un groupe où plusieurs personnes participaient à l’élaboration des chansons à un projet plus personnel ?
Est-ce que c’est difficile d’arrêter un groupe ? Non. Le groupe décide d’arrêter parce que ce n’est plus possible. A un moment donné, il vaut mieux même arrêter, ce n’est pas une solution de continuer, ça ne fonctionne plus. Dans Diabologum, on était deux à composer, les deux autres amenaient leurs instruments quand les chansons étaient construites, existaient déjà avec la voix, les samples, les guitares. Il n’y a pas vraiment eu de difficulté, si ce n’est que quand on est deux à composer, les albums vont plus vite, et que quand tu est seul, ça se fait un petit peu moins vite.

Tu as d’abord composé seul avant de faire appel à des musiciens. Est-ce que tes maquettes étaient définitives ou le groupe a-t-il participé aux arrangements ? Plus généralement, comment s’est déroulé l’enregistrement en studio ?
Sur l’album, il y a quelques titres où je suis seul, en version maquette, c’est resté en version 8 pistes. Enfin aujourd’hui, il ne faut plus dire maquette, parce que tu peux faire de très bons enregistrements à la maison, avec un ordinateur. Simplement, ce qu’on appelle maquette, ce sont des chansons qu’on a enregistré en groupe en conditions 8 pistes, et qui techniquement, n’étaient pas assez précises pour que l’on puisse les garder. J’écris les bases des chansons avec les samples, la guitare et le texte. Sur la fin, le groupe arrive et rajoute ses arrangements sur ce qui existe déjà. Et c’est vraiment un travail à quatre, où chacun essaie de trouver sa place dans le morceau, et essaie d’amener quelque chose au morceau pour lui donner un peu plus de vie. Au départ, les chansons fonctionnaient juste avec des samples, mais j’ai trouvé que ça manquait de vie. Il y avait une énergie rock par les guitares mais sans basse, batterie, deuxième guitare, je trouvais que ça tournait un peu en rond. C’était un peu répétitif, comme toutes les musiques avec des samples. Sauf le hip-hop ou ce genre de choses.

Certains morceaux sont composés uniquement d’un sample et d’une voix. Comment comptes-tu les jouer sur scène ?
Ca dépend des chansons. Il y a des chansons où les samples tournent en séquence derrière, où je suis seul à chanter. Et il y en a d’autres où je joue les samples sur un clavier, et je chante en même temps. Sinon, pour le reste, les samples tournent en séquence et tout le monde joue par dessus.

Quelle est cette mystérieuse voix féminine qui chante à l’unisson avec toi sur  » Deux  » ?
Ma copine, depuis presque dix ans. C’est une chanson d’amour assez simple. Simplement au lieu de dire  » je t’aime , je t’aime , moi aussi, moi aussi « , ça parle plutôt des choses du quotidien, des petits détails qui représentent peu de choses pour la plupart des gens, mais qui pour nous sont très importantes. Le simple fait d’avoir une tasse de café vide le matin au réveil, quand tu te réveilles seul et que ta copine est partie, rien que ça, je trouve ça émouvant. C’est la présence de l’autre à travers les objets, à travers tout ce qui fait ta vie…. C’est aussi inspiré d’un film d’Alain Cavalier, qui s’appelle  » La rencontre « . C’est un film avec un parti pris assez fort. D’ailleurs, c’est un des premiers films qui a été réalisé en DV, bien avant la mode Lars Von Trier et compagnie. En fait, le réalisateur Alain Cavalier parle de sa relation avec sa femme uniquement en filmant les objets de leur vie quotidienne. Au départ, ça peut paraître « concept », mais en fait, c’est un film très simple et vraiment très beau.

Plusieurs des textes semblent contenir une certaine part autobiographique. Est-ce que tu considères cela comme une forme de thérapie ?
Non, vraiment, pas du tout. Je ne vois pas ça comme une thérapie, le fait d’écrire des textes. Au contraire, je vois plutôt ça comme une communication. J’ai avant tout envie de toucher les gens. Il y a des chansons qui sont vraiment très autobiographiques, comme « Aujourd’hui maintenant » ou « Deux ». Il y en a d’autres qui ont des éléments autobiographiques, mais qui sont avant tout des histoires, des fictions. L’idée, quand j’écris une chanson, quand je parle de moi, c’est de faire en sorte que les gens puissent s’identifier et essayer de partager une émotion. C’est vraiment de la musique pour parler aux gens. Je ne fais pas un disque pour écouter ça tout seul chez moi, et prendre plaisir à m’écouter raconter ma vie.

Comment te viens l’idée d’un texte comme celui de « Pour ceux qui aiment le jazz », particulièrement déstructuré, où tu colles bout à bout des éléments qui n’ont apparemment pas de rapport ? Peux-tu nous expliquer la technique du cut-up ?
J’ai beaucoup fais ça à l’époque de Diabologum, sur  » #3 « . Le cut-up, c’est une technique littéraire. Je ne sais pas exactement qui l’a inventée, mais les surréalistes s’en sont servi. Les surréalistes ont surtout fait de l’écriture automatique, c’est à dire que tu écris, sous l’influence de drogues souvent, sans que ça ait vraiment un sens, et au final tu te retrouves avec un texte qui, à priori, n’a ni queue ni tête, mais qui donne un résultat assez psychédélique. Le cut-up a aussi été utilisé par William Burroughs : tu découpes des mots, dans les journaux, dans les magazines, tu les mets dans un sac, tu secoues, tu ressorts, et en fonction du hasard, tu recolles les mots et ça fait un texte. C’est une sorte de liberté par rapport au texte, par rapport aux mots. Il y a plusieurs techniques, il y a aussi le cadavre exquis.  » Pour ceux qui aiment le jazz « , c’est entre le cadavre exquis et le cut-up. Tu prends un mot, et par associations d’idées, tu colles un autre mot à côté.  » Pour ceux qui aiment le jazz « , c’est un truc que j’ai écris en une heure. Tu mets un mot, un autre mot, et puis à un moment donné, la formule arrive :  » Pour ceux qui aiment le jazz, des kilomètres de phrases  » et là le texte prend un sens. C’est vraiment du hasard.

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