KUNGA219
Il semble que Halifax, Nouvelle Ecosse, soit une source riche d’artistes hip hop d’un nouveau genre. Dans la droite lignée de Buck 65 et de Sixtoo, eux-mêmes révélés par l’intermédiaire de leurs amis d’Anticon, voici donc Kunga219, auteur du brillant Tharpa’s Transcripts, et adepte comme ses collègues d’un rap poétique nimbé de lenteurs et de mélancolie. Nous avons voulu en savoir plus, et inviter Kunga219 à se prêter au jeu de notre interview.
Je dois admettre que je te connais mal : d’où es-tu, quels sont tes liens avec Buck 65, Sixtoo et Sole (lesquels apparaissent sur l’album) et l’ensemble d’Anticon ?
Moi-même, Buck et Sixtoo résidons à Halifax, en Nouvelle Ecosse, au Canada, tous deux étaient des artistes que je respectais depuis longtemps et dès que j’ai eu la chance de travailler avec eux je l’ai fait… Quant aux artistes d’Anticon, je les ai rencontrés en me rendant en Californie il y a un an et demi, et quand Sole est venu à Halifax à Noël (1999) on a enregistré des trucs ensemble…
Que signifie ton nom ? Et tout particulièrement ce chiffre, 219 ?
Kunga signifie « plein de joie » en tibétain et c’est une partie de mon nom bouddhiste. Le 219 fait partie d’une vaste vision que j’ai eu quand j’étais tout jeune et nous en resterons là… Mais 21+9=30 est un indice. J’aimais bien aussi l’idée qu’on retrouve dans les grafs, qu’un chiffre puisse être un autre moyen d’identification pour un artiste.
Tu fais partie de The Goods. J’ai lu que ce duo avait déjà sorti des classiques. Est-ce encore disponible ?
Oui, The Goods ont été ensemble pendant quatre étranges années et nous avons trois albums disponibles en CD. The Goods (good-01), Secondary Education (good-02) et Dream Sequence (good-03). Contactez moi à Kunga219@hotmail.com pour les commander ou pour savoir où les commander.
Existent-ils encore ? Quels sont les prochains plans du duo ? Et quels sont ceux de Gordski ?
Oui. Le quatrième album de The Goods sortira en avril et on a un tas de projets à venir. Tout sortira sur GoodNightMusics, donc surveillez ça de près. Le prochain est RooseveltTharpa – ElaborateNeurotics (good-05) avec Tachichi.
Quelle femme se cache derrière la belle voix qui t’accompagne sur l’album ?
Unleavened. C’est une fille géniale de Halifax, et on devrait sortir un EP ensemble l’année prochaine (2001).
Et qui est Tharpa ?
Tharpa est mon middle name. Ca signifie « libération » en tibétain. J’ai utilisé ce nom pour signifier que cet album serait différent de mes travaux précédents en tant que « MC de The Goods ».
J’ai interviewé Buck 65 il y a un moment, et il m’a dit que ses goûts en hip hop étaient très sélectifs. Partages-tu son opinion ? Quel lien fais-tu entre tes oeuvres et l’histoire du hip hop ?
En effet, j’ai un goût sélectif. Je ne suis pas aussi astucieusement critique que Buck, mais j’ai des oreilles critiques. Aujourd’hui je ne fais pas attention parce que je pense que la plupart de ce qui sort est nul et j’essaie juste d’écouter ce qui me touche… Je ne sais pas comment relier mes oeuvres à l’histoire du hip hop. J’ai même du mal à voir ma place dans cette histoire. Vu d’une perspective historique, je veux juste être perçu comme un artiste de Halifax. Je ne veux pas être assimilé au hip hop alternatif ou comme membre d’une « nouvelle école de rappeurs arty ». Je veux juste que les gens se souviennent de ce qu’on a fait ici à Halifax et je pense qu’on aura la reconnaissance que l’on mérite quand tout sera dit et fait…
J’ai posé cette question car ton album me rappelle des artistes venus d’autres genres. Je pense à des gens comme Bark Psychosis ou Hood, ou encore à certains groupes allemands d’electronica (Tarwater par exemple). Tu les connais ? Quelles sont tes influences en dehors du hip hop ?
Je n’ai jamais entendu parler d’eux, mais ça me fait plaisir que tu le compares à des musiques hors hip hop. Les choses que j’ai écoutées en grandissant sont Murphy’s Law, Bob Dylan, Misfits, et Jimi Hendrix. En musique plus récente ce serait Björk… J’adore les films d’Akira Kurosawa, Ran tout spécialement… Je suis aussi profondément influencé par le bouddhisme. Je pratique le vajrayana, de façon tout à fait sérieuse, c’est la priorité dans ma vie. La méditation a eu une grande influence sur moi en tant qu’artiste et encore plus en tant que personne…
D’abord Buck 65, puis Sixtoo, et ensuite toi, et encore plein d’autres gens. Halifax est-elle la nouvelle Mecque du hip hop ?
Je l’espère. Nous avons des talents dans cette ville qui sont totalement ignorés. Je ne voudrais pas passer pour un type amer, mais on devrait être une référence aujourd’hui. Mais bon, nous adorons l’obscurité donc continuons… Je suis heureux de faire de la musique, je voudrais juste toucher plus de fans en participant à des tournées.
Que peut-on attendre de toi et de tes potes en 2001 ?
RooseveltTharpa – Elaborate Neurotics (Tachichi, Kunga219 et Gordski)
The Goods – 4/Four
The Sacred Cow (Kunga219 et Josh Martinez)
Pokey’s Ambition (une compilation de DJ Gordski)
Buck 65 est fasciné par le base-ball, et toi par le basket. Vous avez tous un sport de prédilection ?
En fait, moi et Tachichi sommes fans de basket, Gordski adore le sport en général et Josh Martinez adore le hockey, sinon c’est tout.
Je finis habituellement mes interviews par les quatre questions suivantes : 1) qu’y a-t-il sur ta playlist en ce moment ?
MF Doom – ‘No Snakes Alive’ / MF Grimm – ‘The Original’ (MF)
Aceyalone – Ms Amerikkka (et l’essentiel du Unbound Project)
Big L – The Big Picture
Pas grand chose de plus. Cette sélection m’ennuie déjà.
2) A-t-on une chance de te voir, ainsi que les autres artistes de Halifax sur scène en Europe ?
Je sais pas. J’aimerais bien mais il faut trouver une salle et les moyens de se déplacer. On a l’habitude de faire de supers shows. Meilleurs que ce qui se fait actuellement.
3) Connais-tu le hip hop français, ou la musique française en général, et si oui, qu’en penses-tu ?
Je ne connais pas grand chose, mais d’après ce que j’ai entendu, il doit y avoir de très bonnes choses là-bas…
4) La plupart de nos compatriotes ne comprennent pas les paroles an anglais. Les tiennes sont très poétiques, penses-tu qu’ils pourront apprécier ta musique de la même façon que les anglophones ?
Je ne comprends pas ce que disent les MC’s français, mais je sais apprécier leurs qualités esthétiques : leur voix, leur phrasé, leur énonciation, etc… En revanche, je doute que je puisse apprécier les subtilités et la poésie de leurs vers… Je pense que c’est la même chose pour toi et tes amis. Même si vous ne comprenez pas les paroles à la perfection, si vous appréciez le son et la qualité du spoken word tel que je l’ai enregistré, c’est tout aussi bien. Je suis heureux d’apprendre que des gens en France aient entendu parler de moi, et plus encore que certains d’entre eux aient pris la peine de m’écouter.
Un message ou une affirmation pour finir cet interview ?
Goodnightmusics.com en février 2001 et le reste c’est de l’histoire. Merci d’avoir pris le temps de lire ce que j’avais à dire et de soutenir ce que vous aimez vraiment, sans quoi ça ne le ferait jamais… fuck les majors, let’s dance… lovespiecesmissestheaveragedrunkmc.
propos recueillis par Sylvain