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Disques

Billy Bragg & Wilco – Mermaid Avenue volume 2

BILLY BRAGG & WILCO – Mermaid Avenue Vol. II
(Elektra)

BILLY BRAGG & WILCO -†Mermaid Avenue Vol. IIMermaid Avenue est le nom de la rue de Coney Island où Woodrow Wilson Guthrie, alias Woody Guthrie, acheva en 1967 une vie pendant laquelle il fut le chantre des épreuves du petit peuple américain, en gros de la grande dépression des années 1930 au maccarthysme et à la guerre froide. Compositeur prolifique et extraordinairement doué (« This Land Is Your Land » est une des plus belles chansons jamais écrites), commentateur social engagé, modèle de Bob Dylan sans lequel celui-ci n’aurait jamais osé quitter le Minnesota, Guthrie laissa à sa mort plus de trois cents poèmes sans musique et donc jamais enregistrés, la maladie dégénérative dont il était atteint lui faisant progressivement perdre son autonomie dès le début des années 1950. Gérante des archives familiales et de la fondation Woody Guthrie, sa fille Nora fit appel en 1995 à l’ex-punk anglais Billy Bragg et aux folk-rockers américains de Wilco pour mettre en musique et enregistrer une quarantaine de poèmes de son père ; le volume 1 sortit en 1998 et le second est enfin disponible. 
Qu’on ne s’y trompe pas : ce disque (ainsi que le précédent dont il est indissociable) n’est pas un de ces tribute albums un peu rances dont la décennie précédente a fait ses choux gras, mais bel et bien une réappropriation par des songwriters contemporains de textes qui ont certes perdu au fil des années de leur actualité, mais n’en conservent pas moins un impact littéraire et émotionnel incontestable. Apparemment stimulés par le projet, les participants y livrent le meilleur de leurs (grandes) capacités : l’ancien activiste du Red Wedge, Billy Bragg, y apporte sa caution politique, son écriture délicate (pour une fois que l’une marche avec l’autre) et sa faculté à transcender des collaborateurs dont la subtilité n’était pas jusqu’alors la vertu cardinale (le titre sur lequel chante Natalie Merchant rachète à lui seul l’ensemble de sa discographie). Plus pragmatiques et moins allumés que le cockney, meilleurs musiciens aussi, les quatre de Wilco irriguent pour leur part ces textes avec toute la sève de la musique américaine dont Woody Guthrie fut, à bien des égards, le précurseur : harmonies vocales byrdsiennes (« Secret Of The Sea »), blues-cabaret à la Tom Waits (« Feed Of Man »), ample ballade ferroviaire (« Remember The Mountain Bed ») et une sarcastique imitation de Dylan imitant son idole (« Airline To Heaven »). On ne saura jamais à quoi auraient ressemblé ces chansons si Guthrie avait eu le temps de les enregistrer, mais cette collaboration sincère et pertinente nous montre au moins à quoi elles doivent ressembler aujourd’hui – et c’est déjà beaucoup. 

 

 

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