NEIL YOUNG – Silver And Gold
(Reprise/Warner)
Trois ans ont passé depuis le dernier album de Neil Young et cinq depuis le dernier bon disque studio du Canadien (l’imparable "Mirror Ball"). "Good To See You" entonne le Loner en ouverture de "Silver And Gold" et l’auditeur ne peut qu’approuver, qui retrouve enfin cette voix inimitable et cet enthousiasme que les années (55 aux prochaines châtaignes) ne parviennent pas à émousser. Même si cette fois Neil Young n’a pas éperonné son Crazy Horse pour de longues chevauchées soniques et a préféré s’installer au coin du feu avec sa guitare et son harmonica.
Enregistré avec ses vieux complices Ben Keith et Spooner Oldham, le bassiste de Booker T. Donald "Duck" Dunn et ce merveilleux batteur de sessions qu’est Jim Keltner, "Silver And Gold" est en effet un disque acoustique et paisible, où l’harmonica (dont Neil joue très subtilement tout au long du disque) voisine avec la pedal-steel et où le batteur fait bien attention de ne pas cogner trop fort. Dans cet écrin serti à sa mesure, Neil-Jekyll déploie sa longue carcasse et interprète des chansons à la fois nostalgiques et tendres qui s’écoulent comme le paysage du Midwest regardé à travers la vitre d’un Greyhound. Comme d’habitude chez Neil Young, l’album est sinon inégal, du moins pas totalement réussi – et ce d’autant plus que l’enregistrement s’est étalé sur une période de deux ans pendant laquelle son auteur s’est aussi consacré à tout autre chose, de son méga-coffret rétrospective prévu pour l’automne à l’album poussif de Crosby, Stills & Nash. Et comme d’habitude, les bons moments sont totalement bouleversants : "Distant Camera" est une magnifique évocation de la vieillesse, "Without Rings" emporte l’adhésion grâce à son phrasé buriné et on se love avec bonheur dans la majestueuse déclaration d’amour de "Razor Love". Le reste est parfois anecdotique, jamais vraiment inintéressant et on se surprend à être troublé par une petite chanson toute simple comme "Buffalo Springfield Again", où le chanteur évoque avec une grande délicatesse le groupe majeur dont il a fait partie au milieu des sixties. Un album à l’image de la carrière de son auteur – parfois un peu erratique et titubant mais qui quand il se redresse, laisse échapper des moments de grâce et de sincérité à vif qu’absolument personne d’autre ne peut aujourd’hui se permettre sans être ridicule. Pour cette capacité à mettre à nu ses sentiments, et à accompagner les nôtres, chaque disque de Neil Young est précieux. "Silver And Gold" le sera aussi.
Jean-Christophe
Good To See You
Silver & Gold
Daddy Went Walkin’
Buffalo Springfield Again
The Great Divide
Horseshoe Man
Red Sun
Distant Camera
Razor Love
Without Rings