Cible des maisons de disques, le fan est souvent un pigeon formidable : on lui sort un live d’une banalité exemplaire et il fonce dessus ou bien on déterre quelques vieilleries, pas toujours très présentables, que l’on package dans une compilation de face B et hop le tour est joué … C’est donc toujours avec une certaine appréhension que l’on en vient à acheter une compilation ou un enregistrement en concert. Les Tindersticks nous avaient déjà délivré en 1995 un live extraordinaire (« The Bloomsbury Theatre 12-3-95 ») qui contenait l’essence de leur musique magnifiée par un orchestre à cordes, on pouvait donc s’attendre à un recueil de face B de qualité. Petite appréhension en regardant les douze titres qui composent cet album : ce ne sont pas les nouveautés qui vont nous faire sauter de joie ! Mais la première écoute va nous rasséréner très rapidement car si les Tindersticks sont restés avares en morceaux inédits, ils ont par contre effectué une sélection implacable de merveilles qui semblent écrites pour se cotoyer sur un même album. Si les dates des morceaux naviguent entre 1992 et 1997, la cohérence de « Donkeys… » est exemplaire : aucune faiblesse et un enchaînement évident ! On aura ainsi droit à des versions singles aussi (plus ?) sublimes de Patchwork et Marbles, premiers jets et premières réussites du groupe, à des versions quasiment introuvables (City Sickness, Travelling Night, Bathtime) ainsi qu’à quelques morceaux d’anthologie : une reprise calme et douce-amère de Pavement (Here), un duo aux voix antinomiques (voix fraÓche d’Isabella Rossellini face à celle du crooner de fin de soirées arrosées Stuart Staples) et surtout à une version française aux paroles admirables de No More Affairs. Avec leur live et maintenant cette compilation, les Tindersticks nous montre que sur les faces les plus glissantes de l’industrie du disque leur équilibre est encore plus convaincant.